jeudi 8 octobre 2015

Marc 10:35/45 La viie dans l'au-delà dimanche 18 octobre 2015



Marc 10/35-45 La demande de Jacques et Jean 

déjà publié le  dimanche 21 octobre 2012
 .
35 Les deux fils de Zébédée, Jacques et Jean, viennent lui dire : Maître, nous voudrions que tu fasses pour nous ce que nous te demanderons. 36 Il leur dit : Que voulez-vous que je fasse pour vous ? 37— Donne-nous, lui dirent-ils, de nous asseoir l'un à ta droite et l'autre à ta gauche dans ta gloire. 38 Jésus leur dit : Vous ne savez pas ce que vous demandez. Pouvez-vous boire la coupe que, moi, je bois, ou recevoir le baptême que, moi, je reçois ? 39 Ils lui dirent : Nous le pouvons. Jésus leur répondit : La coupe que, moi, je bois, vous la boirez, et vous recevrez le baptême que je reçois ; 40 mais pour ce qui est de s'asseoir à ma droite ou à ma gauche, ce n'est pas à moi de le donner ; les places sont à ceux pour qui elles ont été préparées.

41 Les dix autres, qui avaient entendu, commencèrent à s'indigner contre Jacques et Jean. 42 Jésus les appela et leur dit : Vous savez que ceux qui paraissent gouverner les nations dominent sur elles en seigneurs, et que les grands leur font sentir leur autorité. 43 Il n'en est pas de même parmi vous. Au contraire, quiconque veut devenir grand parmi vous sera votre serviteur ; 44 et quiconque veut être le premier parmi vous sera l'esclave de tous. 45 Car le Fils de l'homme n'est pas venu pour être servi, mais pour servir et donner sa vie en rançon pour une multitude.



Ce passage se situe au moment où, au cours de son parcours terrestre  Jésus révèle à ses amis  qu’il va lui falloir affronter la mort.  C’est une étape redoutable qui se prépare et qui va mettre un terme à son ministère parmi eux. Il met ses disciples au courant pour qu’ils l’accompagnent  dans cette étape difficile et qu’ils ne le laissent pas seul. Mais ses apôtres ne semblent pas avoir compris, et ils ne comprendront rien jusqu’à la fin. Ils pensent plus à une action glorieuse du Seigneur qu’à sa mort sur une croix,  c’est pourquoi, la demande des fils de Zébédée n’est pas aussi surprenante qu’elle y paraît  même si elle semble déplacée. Inutile donc de vous indigner  avec les autres car pour le moment personne n’a vraiment  compris où étaient les enjeux.


Le temps va passer, les événements annoncés vont se produire, Jésus va mourir et se manifestera ressuscité aux siens. Les apôtres vont d’abord être dispersés, puis ils vont se regrouper, c’est alors que l’Église va se constituer. Cela prendra une génération. C’est alors que ceux qui ont fondée l’Église vont mourir les uns après les autres et que la nécessité d’écrire tous ces événements va se faire sentir. C’est Mac,  le premier qui va s’atteler à cette tâche, du moins il est le premier dont les écrits vont nous parvenir.

A ce moment-là, alors que les premiers témoins de Jésus ont commencé à disparaître, on va vraiment se poser la question de l’au-delà. Quel est  désormais le sort des défunts ?  Marc en racontant  les événements passés va tenter de répondre à ces questions qu’on ne se posait pas de la même façon du vivant de Jésus.

L’épisode des fils de Zébédée raconté ici va porter en lui le reflet des préoccupations des apôtres avant la mort de Jésus. Mais en même temps il sera marqué par les questions de l’au-delà que l’on se posait au moment de la disparition de la première génération des témoins de Jésus quelques quarante ans plus tard. Jésus quant à lui  n’a répondu  ni aux préoccupations de ses disciples avant sa mort, ni à celles des chrétiens  dans les années qui suivirent.  Nous ne pourrons percevoir sa pensée qu’en essayant de lire attentivement l’Évangile. Marc est cependant assez habile pour nous mettre sur la bonne  voie.

Au moment  du récit, les amis de Jésus pensaient que le  Royaume terrestre que Jésus allait établir inaugurerait aussi les temps à venir. On espérait  que Jésus allait  prendre le pouvoir et instaurer un règne nouveau.  Il était normal que dans cette perspective, les apôtres prennent les devants pour être en bonne place quand les événements annoncés se produiraient.

La réponse de Jésus nous gène parce qu’il ne remet pas les deux apôtres à leur place comme on pourrait s’y attendre.  Auront-ils part avec lui à la gloire du Christ se demandent-ils?  Sans doute, répond Jésus.  Y auront-ils une place de choix ?  Nul ne le sait, en tout cas, Jésus ne dit pas non, mais il élève le débat. Il se livre alors  à un développement théologique sur la nécessité de devenir serviteur des autres. En fait Jésus a déjà anticipé l’avenir, il pense sans doute à ce moment où il ne sera plus là et où il leur faudra organiser l’Église. Il leur donne alors les règles qui devront prévaloir dans la gouvernance de la communauté.

C’est le renversement des  valeurs qui sera la règle. La norme pour être au premier rang sera la qualité du service auprès des autres. Pour ce que nous en savons les disciples auront du mal à respecter cette règle, même s’ils essayeront d’en tenir compte. Je ne dirai rien sur l’usage de ces préceptes que l’Église a fait par la suite. 
En fait, notre malaise en face d’un tel passage procède du fait que nous n’avons pas compris que Jésus ne parle pas de la vie de l’au-delà mais de l’organisation de l’Église terrestre.  Notre esprit reste ballotté entre ces deux tensions. D’une part  il est absorbé par le souci de l’organisation nécessaire de la vie de l’église, qui doit être radicalement différente de la vie de la société ambiante  et d’autre part le souci de la vie dans  l’au-delà dont nous ne savons rien.  La question qui se pose à nous est alors la suivante : comment pourrions-nous être heureux  dans le monde de l’au-delà s’il ressemble à la société idéale sans conflits que l’on peut imaginer pour l’Église?   Au fond de nous-mêmes, nous découvrons que ce monde aseptisé ne serait pas très captivant.

C’est sans doute ce qui se dégage de nos concepts théologiques  quand nous essayons d’imaginer  l’au-delà. Nous imaginons une société telle que  personne  n’a envie de  la partager parce qu’elle se déroulerait dans un monde qui n’aurait rien de stimulant. On a du mal à se projeter  dans une société que l’on imagine  rendue parfaite par Dieu. Tout en ressemblant  à la société actuelle  elle serait sans rivalité, sans défis, sans compétition, sans attrait. En fait,  nous ne pouvons pas imaginer le monde du futur avec des règles de morale que nous ne sommes pas capables de respecter  ici-bas. Pourtant, nous nous laissons aller à croire que Dieu  pourrait nous imposer ces règles  par la douceur.  Mais nous savons aussi que nous ne pourrions  nous en écarter  sous peine d’être  rejetés dans les ténèbres de dehors où il y a des pleurs et des grincements de dents. Cela n’aurait rien à voir avec le  paradis supposé.  Si  cette image est vraiment le reflet de notre espérance, nous comprendrons aisément qu’elle ne soit  pas racoleuse. Elle ne rend compte ni de l’amour de Dieu ni de l’espérance  que Jésus nous a fait entrevoir. La vérité est donc ailleurs.

Même s’ils nous choquent par leurs revendications, Jacques et Jean nous donnent cependant une leçon. Même si leur foi  repose sur un  malentendu, ils nous montrent bien qu’ils ont compris qu’il y avait un lien étroit entre la vie que nous menons ici bas et la vie telle que nous la mènerons dans l’autre monde. Ils ont cependant, maladroitement compris que cette vie du futur serait  assez attractive pour que l’on commence à s’en soucier dès maintenant.

Quand ils imaginent qu’ils participeront à la gloire de leur maître, ils pensent à une reprise en main de ce monde par Dieu dont Jésus serait le lieutenant terrestre. Le monde futur serait ainsi inauguré en douceur. On passerait directement de cette vie  dans le   Royaume sans passer par le traumatisme de la mort. Mais ce n’est pas le cas.  Ils ont  encore  à l’esprit,  l’image   d’un monde futur qui ressemblerait au nôtre, en mieux.

Jésus va aller à l’encontre de leurs principes. Il va leur dire que ça ne marche pas comme cela, et que l’au-delà n’est pas conforme au fruit de leur imagination ou de leur désir,  il est tout autre. Il réclame de nous une autre manière d’appréhender la vie et par conséquent la mort.  Il y a certes des correspondances entre la réalité future et la réalité présente, mais elle n’est pas seulement liée à un renversement des valeurs,  elle est liée à une autre manière d’être ou plutôt à une autre manière de vivre le dépassement de la mort.

Jésus leur parle alors du baptême qu’il va vivre et de la coupe qu’il va boire qui seront les liens par lesquels ses amis continueront à être en relation avec lui. Ce baptême et cette coupe nous amènent à comprendre que notre avenir n’est pas une projection de notre vie actuelle dans un idéal céleste moralement amélioré, mais que ce sera tout à fait autre chose.

Pour que nous puissions avoir un avenir, il faut qu’il y ait comme une sorte de déplacement du ciel vers la terre,  il faut que Dieu fasse irruption dans notre présent pour que celui-ci soit illuminé par la vie de l’au-delà.  Il nous faut donc laisser Dieu  venir en nous. Il faut aussi le vouloir.  C’est comme si le futur venait à la rencontre de notre présent pour anticiper les temps futurs, c’est la résurrection qui vient à notre rencontre pour nous faire vivre dès aujourd’hui ce que nous vivrons demain. La résurrection doit devenir notre règle de vie, que nous soyons déjà morts ou encore vivants. Ce sont des images difficiles à comprendre, sur lesquelles Jésus ne nous donne aucune précision,  Il nous dit seulement  que le monde futur est en train de se réaliser dans le présent et que le présent se construit en se remplissant du futur.

La résurrection  promise par Jésus doit imprégner tous les stades de notre vie présente, si bien que  la  vie nouvelle dans laquelle nous entrons par  notre mort n’est que l’accomplissement de notre vie commencée avec Jésus et qui entrera  alors en plénitude.


Illustrations : Le Christ en croix Salvador Dali

Aucun commentaire: