dimanche 18 janvier 2015

Genèse 9:8-15 L'Alliance avec Noé - dimanche 22 février 2015



Genèse 9/ 8-15


8 Dieu dit encore à Noé et à ses fils avec lui : 9 Quant à moi, j'établis mon alliance avec vous et avec votre descendance après vous, 10 avec tous les êtres vivants qui sont avec vous, tant les oiseaux que le bétail et tous les animaux sauvages, avec tous ceux qui sont sortis de l'arche, avec tous les animaux sauvages. 11 J'établis mon alliance avec vous : tous les êtres ne seront plus retranchés par les eaux du déluge, et il n'y aura plus de déluge pour anéantir la terre. 12 Dieu dit : Voici le signe de l'alliance que je place entre moi et vous, ainsi que tous les êtres vivants qui sont avec vous, pour toutes les générations, pour toujours : 13 je place mon arc dans la nuée, et il sera un signe d'alliance entre moi et la terre. 14 Quand j'aurai rassemblé des nuages au-dessus de la terre, l'arc apparaîtra dans la nuée, 15 et je me souviendrai de mon alliance entre moi et vous, ainsi que tous les êtres vivants, et les eaux ne se transformeront plus en déluge pour anéantir tous les êtres.



La Bible nous dit que Dieu a fait l’homme à son image. Les philosophes qui critiquent la religion disent exactement le contraire, selon eux c’est l’homme qui aurait créé  Dieu à la dimension de ses désirs. On va cependant s'apercevoir que beaucoup de choses ne collent pas. Nous allons plutôt découvrir que  le  Dieu dont nous parle l’Ecriture  et auquel nous croyons n’est pas la somme des désirs que nous projetterions sur lui, au contraire, il est insaisissable et cependant tout proche, il est tout autre, et  il est ailleurs que là où nous le plaçons.

Un tsunami vient de se produire et l’avenir de l’humanité toute entière a été menacé. Dans le récit qui nous est fait de l’événement nous découvrons que le narrateur prête à Dieu un  double jeu. Il lui fait prendre des positions  contradictoires tout au long du  récit. C’est lui, Dieu,  qui aurait  provoqué la catastrophe et il serait en même temps intervenu pour que le drame ne soit pas total. En ce sens Dieu ressemblerait bien à l’image de l’homme puisqu’il balancerait en même temps entre  la chose et son contraire.

Nous découvrons là l'aspect insaisissable de la personnalité de Dieu, il met lui-même  en cause sa toute puissance  en laissant ses sentiments de générosité  prendre le dessus.  Pourtant  c'est sa  propre colère qui  est sensée être à l’origine du drame. Il se serait mis en colère quand il aurait réalisé que les hommes lui  échappaient et  qu’il ne les contrôlait plus. Était-ce d’ailleurs de la colère ou du dépit ? Il n’aurait pas supporté que leur liberté les pousse à se détourner de lui.

Dieu  voulait sauvegarder sa toute puissance et en même temps donner droit à  sa générosité. Il aurait donc décidé de couper la poire en deux en  conservant  le meilleur spécimen de l’espèce humaine pour essayer de tout recommencer. Nous aurions là  comme un plaidoyer  de la part de l’auteur  du récit de Noé pour essayer de dire que l’homme après tout n’est pas si mauvais et qu’il lui est possible de vivre face à la justice de Dieu sans que ses fautes entraînent sa disparition. L’auteur affirme même que Dieu serait prêt à reconnaître qu’il se serait trompé au sujet de l’homme,  si bien que toutes nos théories sur la déchéance de l’homme après la chute seraient à revoir.   Nous découvrons ici, un Dieu inquiet, enclin aux concessions. Cela vaut donc le coup qu'on y réfléchisse d’un peu plus près car un  tel portrait pourrait amener le  lecteur un peu critique à ne plus faire confiance en un tel Dieu ! 

La suite  du récit nous présente la mise en place de cette nouvelle situation, Dieu va établir de nouvelles règles pour permettre à l’humanité de s’accomplir. Chose étrange, il commence par  s’imposer à lui-même des contraintes, car l’arc qui va s’allumer dans la nue  n’a pas d’autre but que celui d’avertir, Dieu  que la situation qui se présente l’invite à la patience et non à la colère. L’arc devient un régulateur de l’humeur de Dieu pour le prévenir de toute intervention contre les hommes

Je m’émerveille de découvrir que  ce texte éclaire comme un phare puissant tout le reste de l’Écriture.  Il présente  Dieu  comme compatissant,  lent à la colère, inquiet de voir l’homme se perdre,  et toujours soucieux d’inventer une nouvelle solution pour sauver l’homme quand il se met dans un mauvais pas. Mais l’homme  reste libre d’en faire à sa guise et de ne pas suivre les propositions que Dieu lui suggère.  Dieu  n’interviendrait donc pas dans les événements du monde mais se contenterait de suggérer à l’homme des solutions. Dieu serait celui qui  donnerait  des règles de vie aux hommes et se contenterait  de les accompagner  quand ils auraient fait le projet de le suivre les guider sur le bon chemin.

Nous savons que les hommes auront du mal à accepter cette image de Dieu. Ils chercheront à conserver l’image de Dieu  en le présentant  comme  un Dieu tout- puissant qui gère le monde à sa guise et en punissant l’homme quand il ne marche pas selon sa
volonté. Tout au long des Ecritures nous assistons au combat que se livrent les écrivains bibliques  pour imposer l’une ou l’autre image de Dieu. Les prophètes seront persécutés pour se libérer de ce double choix et accréditer  celui du Dieu qui préfère pardonner que punir. C’est cette image de Dieu qui aura la faveur de Jésus et qui présentera  Dieu sous les traits d’un Père affectueux plutôt que sous les traits d’un juge sévère.  Mais les fausses images sur Dieu sont tenaces et Jésus aura du fil à retordre pour lui donner toute sa valeur.

Ainsi, il m'importe peu que ce soit Dieu qui ait créé l’homme à son image ou le contraire. Ce qui importe, c’est qu’en acceptant les textes fondateurs, nous acceptions  cette image du Dieu aimant qui ne nous est pas naturel et qui ne peut être le fruit de l’invention humaine.  C’est alors qu’en toute cohérence  nous reconnaissons qu’elle ne peut avoir  son origine qu’en Dieu.

Que l’on tourne alors seulement une page de l’Écriture pour lire la suite du récit de Noé, que l’on se donne la peine de lire les lignes qui suivent le récit du déluge,  et on découvrira que l’homme imbu de sa liberté  s’empresse d’oublier les préceptes de Dieu.  A peine cette alliance de coopération  et de sagesse est-elle conclue avec Dieu que Noé la  transgresse. Le sage Noé, choisi entre tous pour préserver l’humanité transgresse toutes les règles  que l’on vient d’entendre. Il perd le contrôle de lui-même. Il donne dans tous les débordements possibles, l’abus d’alcool lui fait perdre la raison et il succombe à des comportements douteux, voire incestueux suivant certains commentateurs avec son plus jeune fils. Tout serait donc à recommencer, car l’homme ne peut devenir libre sans être guidé.

Dieu devrait le faire périr puisqu’il renonce à être guidé et que son comportement devient pire qu’il était au paravent.  A renoncer à jouer ce rôle, Dieu  s’est  converti à jouer le jeu de l’humanité en dépit de tous les  obstacles qu’elle dresse contre elle-même, et Noé pourra continuer à vivre. En fait ce n’est pas Dieu qui a changé, c’est l’éclairage que les Ecritures portent sur lui qui peu à peu s’est modifié. L’histoire de Noé nous apprend que l’homme ne peut  parvenir par lui-même à un comportement acceptable. Il faut qu’il soit guidé par celui qui se tient tout près de lui, et qui n’est pas lui.

En nous appuyant sur nos propres expériences  nous constatons que nous ne  savons pas vraiment repérer les limites entre le bien et le mal, nous ne savons pas maîtriser les forces qui nous animent. Ce constat ne peut se faire  qu’en découvrant Dieu sous les traits que ce texte lui donne.  Il n’est pas un être d’autorité qui domine et contraint
mais une réalité de douceur et d’abnégation. Douceur vis à vis des autres et abnégation vis à vis de lui-même. Ces qualités se résument en un seul mot : celui d’amour. Homme et Dieu se trouvent désormais partenaires d’un même projet  dont le seul instrument pour le mener à bien est le même pour l’un comme pour l’autre : c’est le verbe aimer. Pour y arriver, Dieu  attend patiemment que les hommes le reconnaissent. Il ne force personne, mais avec  douceur il attend.

C’est alors une nouvelle étape qui se prépare  pour nous. Dieu nous  apprend à conjuguer le verbe aimer à tous les temps et à tous les modes.  Il nous apprend toutes les nuances du mot. Eros ou Agapè signifient tous les deux aimer de deux manières différentes mais  qui excluent l’un et l’autre l’idée de dominer. Déjà à l’ombre de Noé et malgré sa terrible rechute, nous voyons se profiler  entre nous et Dieu la personne de Jésus que l’Evangile rend tellement vivant qu’il se met à vivre en nous. Il dépasse alors les limites du temps et de l’espace. Sa vie, ses paroles, sa mort et sa résurrection deviennent pour nous autant d’événements qui rendent Dieu présent. En sa compagnie nous nous sentons libres et responsables d'agir, si bien qu'aucune crainte, aucune angoisse, ne peut limiter notre espérance quand nous  parcourons notre vie d'homme en sa compagnie.


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