vendredi 7 novembre 2014

Jean 1:6-8 et 19-28 : Une voix dans le désert. Dimanche 14 décembre 2014



Jean1 :6-8 et 19-28 :


6 Survint un homme, envoyé de Dieu, du nom de Jean. 7 Il vint comme témoin, pour rendre témoignage à la lumière, afin que tous croient par lui. 8 Ce n'est pas lui qui était la lumière ; il venait rendre témoignage à la lumière.

9 La Parole était la vraie lumière, celle qui éclaire tout humain ; elle venait dans le monde.
10 Elle était dans le monde,
et le monde est venu à l'existence par elle,
mais le monde ne l'a jamais connue.
11 Elle est venue chez elle,
et les siens ne l'ont pas accueillie ;
12 mais à tous ceux qui l'ont reçue,
elle a donné le pouvoir
de devenir enfants de Dieu
— à ceux qui mettent leur foi en son nom.13Ceux-là sont nés, non pas du sang, ni d'une volonté de chair, ni d'une volonté d'homme, mais de Dieu.
14 La Parole est devenue chair ;
elle a fait sa demeure parmi nous,
et nous avons vu sa gloire,
une gloire de Fils unique issu du Père ;
elle était pleine de grâce et de vérité.
15 Jean lui rend témoignage, il s'est écrié : C'était de lui que j'ai dit : Celui qui vient derrière moi est passé devant moi, car, avant moi, il était.
16 Nous, en effet, de sa plénitude
nous avons tous reçu,
et grâce pour grâce ;
17 car la loi a été donnée par Moïse, la grâce et la vérité sont venues par Jésus-Christ.
18 Personne n'a jamais vu Dieu ; celui qui l'a annoncé, c'est le Dieu Fils unique qui est sur le sein du Père.
Ce que Jean le Baptiseur dit de lui-même

19 Voici le témoignage de Jean, lorsque les Juifs lui envoyèrent de Jérusalem des prêtres et des lévites pour lui demander : Toi, qui es-tu ? 20 Il le reconnut, il ne le nia pas, il reconnut : Moi, je ne suis pas le Christ. 21 Ils lui demandèrent : Alors quoi ? Toi, es-tu Elie ? Il dit : Je ne le suis pas. — Est-ce toi qui es le Prophète ? Il répondit : Non. 22 Ils lui dirent alors : Qui es-tu ? — que nous puissions donner une réponse à ceux qui nous ont envoyés ! Que dis-tu de toi-même ? 23 Il dit :
Moi, je suis celui qui crie dans le désert :
Rendez droit le chemin du Seigneur,
comme a dit le prophète Esaïe.
24 Ceux qui avaient été envoyés de chez les pharisiens 25lui demandèrent : Pourquoi donc baptises-tu, si, toi, tu n'es ni le Christ, ni Elie, ni le Prophète ? 26 Jean leur répondit : Moi, je baptise dans l'eau ; au milieu de vous, il en est un que vous ne connaissez pas 27 et qui vient derrière moi ; moi, je ne suis pas digne de délier la lanière de sa sandale.
28 Cela se passait à Béthanie, de l'autre côté du Jourdain, là où Jean baptisait.




Mais qui donc est Dieu ?  Il ne représente pas une réalité que nous  puissions voir ou  qui pourrait frapper nos  sens. C’est en  faisant ce constat, que   beaucoup cessent de croire en Dieu car, il est évident qu’on ne peut  le voir agir. «  Message bien reçu » disent les défenseurs de Dieu. Mais   l’argument leur paraît un peu court. C’est aller un peu vite en besogne,  que de conclure aussi vite que parce qu’on ne le voit pas agir que Dieu n’existe pas, et chacun de rechercher dans la littérature ou dans ses expériences personnelles des arguments qui lui permettrait de dire  aux détracteurs de Dieu que sans sa présence nous ne pourrions pas appréhender les réalités de ce monde.

En effet, il suffit de voir la  structure compliquée d’un insecte pour concevoir que tout cet assemblage subtile  a été conçu  par un être supérieur. Comment ne pas penser que le champ des étoiles n’a pas été imaginé par un esprit organisateur ?  Pour peu que l’on s’aventure dans ce genre de raisonnement, il est évident que l’on trouvera toute  sorte  de témoignages faisant état de miracles dont les récits tendraient à démontrer que Dieu n’hésite pas à  contrarier les règles de  l’évolution  du monde  pour démontrer son extrême liberté  par rapport à cet univers où nous sommes  et attester de   sa supériorité sur toute chose. La Bible fourmille d’exemples. En défendant de tels arguments,  ceux qui  s’appuient sur eux   apportent de  l’eau au moulin de leurs adversaires  qui auront vite fait de démontrer qu’en agissant contre l’ordre des choses qu’il a créé, Dieu ne serait pas crédible et démolirait lui-même les  éléments qui plaident en faveur de son existence.

Certes, si la Bible n’est pas avare de récits qui  plaident en faveur de la toute puissance de Dieu, elle ne s’en sert pas vraiment pour démontrer  son existence. Elle préfère
argumenter à partir d’autres  éléments  dont  nous allons essayer de dégager la pertinence.  Cela nous demandera de faire un effort intellectuel pour déceler  la trame  d’une autre approche  qui se dissimule dans la profondeur   des textes. C’est à partir des verbes  dire et parler que nous allons  chercher la pertinence de ces arguments.  En effet, dans de   nombreux récits le texte ne dit pas «  voyez ce que Dieu fait », mais  « écoutez ce que Dieu dit ». Tout au long  des récits on nous dit que Dieu parle et non pas qu’il fait.  Il cherche à se faire entendre plus qu’il ne cherche à se faire voir. Dieu ne se révèle pas par ce qu’il laisse transparaître de lui, mais par ce qu’il est censé dire.

Au commencement, c’est la voix de Dieu qui retentit dans l’immensité où rien n’existait encore et  qui n’était que Tohu Bohu afin que ce qui  était seulement en devenir s’organise pour devenir la réalité dans laquelle nous évoluons encore aujourd’hui. Mais qui donc a pu entendre  cette voix demandant que   les choses existent  puisque rien n’était encore conçu  pour  l’entendre  et exécuter l’ordre divin?   Gaffe des auteurs  ou raisons plus subtiles ?

Bien entendu, ces textes ont été rédigés bien plus tard, à une époque où les prophètes s’appliquaient à  évoquer  la présence de Dieu en le faisant  parler. C’est donc en évoquant des sons et des mots qu’ils  on rendu compte de leur expérience  avec Dieu.  C’est ce que nous rappelle le début de l’Evangile de  Jean qui sert de support à notre réflexion en évoquant la voix de celui qui crie ans le désert.  Cette voix a été empruntée au prophète Esaïe,  elle est proférée pour les contemporains de Jésus  par la bouche de Jean  Baptiste dans des conditions semblables à celles imaginées,   jadis par le génie  des écrivains bibliques quand ils ont voulu décrire l’origine du monde. La voix de Dieu  qui ne pouvait pas encore être entendue fut cependant obéie   et les choses qui devaient être créé advinrent.   Ainsi naquirent les étoiles et le firmament, la lune et le soleil, la terre et les mers, les végétaux et les animaux et l’homme en dernier.

En  évoquant la voix de Dieu  qui retentit dans le désert, le prophète Esaïe utilise la même image.  Il parle  du désert où la voix ne pouvait être entendue par personne. On se retrouve dans le même cas de figure que dans le récit de la création. Il y a fort à parier que ce dé
sert, pris au sens figuré, désigne l’âme humaine qui cherche à comprendre quelque chose de Dieu et qui doit faire le vide en elle afin que la voix de Dieu puisse faire  son œuvre, car pour être créatrice la voix de Dieu ne doit rencontrer aucun  obstacle qui la contrarie.  Nous sommes donc  invités par ce contexte à faire le vide en nous  pour que nos voix intérieures se taisent et que  nous puissions entendre Dieu qui nous parle.

L’Evangile de Jean nous rapporte alors, à partir de l’expérience de Jean Baptiste qui fait suite à celle d’Esaïe, comment maîtriser nos voix intérieures pour laisser Dieu nous parler et se faire reconnaître. C’est seulement quand nous aurons entrepris  nous-mêmes cette même expérience avec succès que nous pourrons reconnaître la réalité de Dieu ou la rejeter.

En effet, ceux qui  rejettent Dieu  et nient sa réalité, le font à partir d’arguments faciles  qu’ils puisent dans leurs expériences personnelles  sans forcément   chercher à approfondir ce qui se passe en eux. Ils  partent de leur insatisfaction personnelle et constatent que Dieu ne peut y répondre. Cela   les amène à décider un peu vite de sa non existence.

 Si l’homme est mauvais disent-ils, c’est la faute de Dieu  qui l’a voulu ainsi, et s’il ne l’a pas voulu, c’est qu’il est impuissant. Ils font le même raisonnement au sujet des guerres, des maladies incurables, des  accidents d’avion ou des tsunamis.  Il leur est plus confortable d’accuser  Dieu d’incapacité plutôt que d’envisager que la réalité des choses n’est pas aussi simpliste.

Ce réquisitoire contre les négateurs de Dieu étant fait, revenons au discours de Jean Baptiste. Il commence par porter un regard négatif sur lui-même. Il déclare qu’il n’est ni Elie, ni le Messie, ni le prophète. En se décrivant ainsi,  il fait le vide en lui en ne  se  reconnaissant aucune capacité à être porteur de quoi que ce soit qui l’autorise à parler de Dieu. Il neutralise ainsi tout ce qui en lui pourrait  altérer la voix de Dieu. Puis, évoquant Jésus dont il se sait le messager et dont il nous dira plus tard qu’il nous baptise
ra de saint Esprit, il nous dit qu’il vient.  Il nous oriente ainsi sur un avenir qui se réalisera plus tard,  c’est dire que la première vertu de la parole de Dieu, quand elle nous atteint est de nous parler d’avenir. Dieu n’est donc pas le Dieu du passé, même s’il s’appuie sur le témoignage des pères. Ce qui importe, c’est qu’il habite l’avenir vers lequel il nous pousse à la rencontre de nos prochains que nous ne pouvons qu’aimer comme nous-mêmes.  C’est ce que dit Jésus.

A partir de là, nous avons tous les éléments nécessaires et suffisants pour entendre Dieu. Il nous faut faire le désert en nous,  en oubliant tout ce qui nous vient de nous-mêmes,  pour nous orienter vers le devenir de nos prochains, tout en laissant le Saint esprit nous envahir et nous parler au nom de Dieu. Une fois cette expérience faite, nous pouvons honnêtement nous interroger sur Dieu.

Sans doute, certains continueront  à camper sur leurs a priori hostiles à Dieu, c’est leur droit, mais je suis sûr que beaucoup découvriront qu’il y a possibilité d’entendre Dieu  qui leur dit qu’il y a de l’avenir pour eux et  pour les autres. Ils comprendront également que Dieu les implique dans la réalité du monde présent où il nous demande de prendre nos responsabilités, si bien que trop concernés par notre participation au monde présent, nous ne
chercherons plus Dieu dans le passé, ni dans le discours des philosophes, mais nous le trouverons engagé avec nous dans la réalité du monde qui se construit jour après jour (1). C’est avec lui que nous lutterons contre les violences et les injustices afin que le nouveau monde prenne corps.

(1)  Nous redisons ici à notre manière, ce que Pascal avait déjà dit.

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