samedi 29 mars 2014

Matthieu 21:1-11 - Les Rameaux




Matthieu 21/1-11  - Les Rameaux - dimanche 13 avril 2014



1 Lorsqu'ils approchèrent de Jérusalem et qu'ils furent arrivés à Bethphagé, vers le mont des Oliviers, Jésus envoya deux disciples 2 en leur disant : Allez au village qui est devant vous ; vous trouverez aussitôt une ânesse attachée, et un ânon avec elle ; détachez-les, et amenez-les-moi. 3 Si quelqu'un vous dit quelque chose, vous répondrez : « Le Seigneur en a besoin. » Et il les laissera aller tout de suite. 4 Cela arriva afin que s'accomplisse ce qui avait été dit par l'entremise du prophète :


5 Dites à la fille de Sion :

Ton roi vient à toi,

plein de douceur, monté sur une ânesse,

sur un ânon, le petit d'une bête de somme.

6 Les disciples allèrent faire ce que Jésus leur avait ordonné. 7 Ils amenèrent l'ânesse et l'ânon, sur lesquels ils mirent leurs vêtements ; il s'assit dessus. 8 La plupart des gens de la foule étendirent leurs vêtements sur le chemin ; d'autres coupèrent des branches aux arbres et les étendirent sur le chemin. 9 Les foules le précédaient et le suivaient en criant :

Hosanna pour le Fils de David !

Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur !

Hosanna dans les lieux très hauts !

10 Lorsqu'il entra dans Jérusalem, toute la ville fut en émoi. On disait : Qui est-il, celui-ci ?



11 Les foules répondaient : C'est le prophète Jésus, de Nazareth de Galilée.

Jésus chasse les vendeurs du temple



12Jésus entra dans le temple. Il chassa tous ceux qui vendaient et qui achetaient dans le temple, il renversa les tables des changeurs et les sièges des vendeurs de colombes. 13Et il leur dit : Il est écrit :

Ma maison sera appelée maison de prière.

Mais vous, vous en faites une caverne de bandits.



Jésus, arrive toujours vers nous d’une manière surprenante. Ici il surgit au détour d’un chemin sur une ânesse qui le porte. Dans le texte tel que  Matthieu le rapporte, il s’agit de la mère du petit âne. Si Jésus  porte en lui   la Parole de Dieu, l’ânesse, , devient  par voie de conséquence porteuse de la Parole de Dieu.  Comme si ça ne suffisait pas pour Jésus de se servir des animaux pour porter la Parole de Dieu, il associe aussi la nature à cette action et  il invite les pierres du chemin à crier la gloire de Dieu.  Mais, ce n’est pas tout. Entrant dans le temple, par le seul geste  de violence qui lui soit connu, il prétend le purifier. Mais le temple de Dieu n’est ce pas aussi notre corps (1 Cor 6/19)? Jésus pourrait-il nous faire violence afin que nous  devenions à notre tour, aptes à porter  sa parole comme un âne  et de la proclamer comme un vulgaire caillou ?  Mais ce  texte  nous pose encore bien d’autres questions.

Quand nous ouvrons notre Bible c’est généralement avec l’intention d’y trouver une parole de Dieu qui nous encourage et qui nous  apporte  un éclairage particulier sur les choses de la vie ! Mais la Parole de Dieu ne se laisse pas saisir, c’est plutôt elle qui  s’empare de nous et qui s’impose à nous pour nous entraîner là où nous n’avons pas forcément  l’intention d’aller. C’est ainsi, elle qui suscite en nous des idées nouvelles  qui  prennent place en nous et ne quittent plus notre esprit. Telle est l’action secrète de la Parole de Dieu quand nous acceptons   que le Saint Esprit lui ouvre le chemin de notre vie intérieure.

 Plutôt que de nous extasier en regardant Jésus qui se donne en spectacle dans un  rôle de roi  d’opérette sous les yeux des badauds de Jérusalem, qui le regardent sans comprendre,  nous allons essayer de découvrir les autres aspects de cette histoire. En fait  ce rôle de spectateurs ne nous sied mal,  c’est pourquoi Jésus va faire de nous des acteurs. Il nous invite à édifier avec lui le Royaume de Dieu, car c’est   la tâche qu’il s’est donné d’accomplir  et pour laquelle  il est venu.

Combien de fois n’avons-nous pas entendu ce récit de Jésus qui se fait acclamer par la foule le jour des Rameaux sans que cela ne change rien du tout dans notre vie. Pourtant, on n’a pas manqué d’attirer notre attention sur les réalités du Royaume que Jésus est en train d’instaurer. Quel que soit l ‘Evangile qui nous le rapporte, Jésus y surgit comme s’il venait  de nulle part et s’impose à nous comme celui qui  veut prendre autorité sur nous.  Mais nous  avons du mal à rejoindre Jésus dans la réalité de ce récit où il se montre dans une situation étrangement inhabituelle.

 En effet c’est un âne qui est le héros du jour. Nous savons que l’âne était jadis le fidèle compagnon du roi David, c’est sur lui qu’il avait fait asseoir son fils Salomon pour conjurer la révolution de palais qu’un autre de ses fils  Adonija avait fomentée.  Le  futur roi Salomon avait suivi, à peu de choses près le même parcours que l’on prête à Jésus ce jour là. Pour arriver au palais et débouter son usurpateur de frère,  Salomon était parti de la fontaine de Guihon, avait parcouru les ruelles de Jérusalem et était arrivé sur l’esplanade du Temple où se trouvait aussi le palais. L’âne sur lequel Salomon était monté et sur lequel plus tard Jésus montera,  est un élément tellement familier dans le décor  biblique que nous l’avons mis dans la crèche de Noël, même si les Ecritures ne l’y placent pas. L’âne porte donc toute  une partie  de la tradition biblique, il est porteur de Jésus qui est lui-même porteur de la parole de Dieu. Serait-il alors pertinent de nous  demander si  Jésus n’aurait pas souhaité que l’âne ce soit moi, ou ce soit vous, c ‘est à dire le peuple de l’Eglise ? » 

Au lieu de rester un simple spectateur  et de regarder les choses de l’extérieur, prenons donc la place de l’acteur le plus humble.  Il nous sera alors plus facile de voir les choses au raz du sol.  Sans fausse modestie, nous voilà donc dans le rôle de l’âne pour mieux voir cette foule qui vocifère et qui acclame son roi.  Avez-vous remarqué  que la tradition de nos églises a repris dans ses chants les acclamations de la foule aux Rameaux, si bien que chaque fois que nous chantons alléluia, c’est Jésus en tant que roi que nous acclamons. Cette simple remarque nous rappelle que le sens de notre culte consiste à conférer à Jésus les pleins pouvoirs sur notre communauté, sur notre Eglise et sur nous-mêmes.

Ainsi nous vous voila engagés à accompagner Jésus comme le plus modeste des  acteurs de cet événement.  Si le chemin devient trop rude, et que  l’âne  que nous sommes trébuche, si la foule dans laquelle nous sommes mêlés est fatiguée, à bout de  force et ne peut plus chanter, ou si  l’Eglise  dont nous sommes membres   aujourd’hui se démobilise à force d’habitude,  c’est alors que nous sommes invités à réaliser que nous ne sommes même pas capables d’être les pierres du chemin sur lesquelles marche le Seigneur.  Le monde semble se passer de nous, car si nous nous taisons les pierres  crieront. Et aujourd’hui ce sont les pierres qui crient vraiment, en tout cas qui disent ce qui doit être dit sur Jésus.

En effet quand les touristes avides de culture  viennent  admirer, les cathédrales, ce n’est pas les offices religieux, auxquels ils n’assistent pas, ni même les guides qui leur parlent de la Bible, mais  ce sont  les bas reliefs, les tympans, les chapiteaux qui leur racontent les merveilles de Dieu.  Le travail de transmission se fait  par le biais de la culture,  les cathédrales, bien sûr  mais aussi la musique, la peinture et toutes les merveilles de nos musées. 


 Aussi intéressant soit-il sur le plan culturel,   l’Evangile  semble avoir perdu son aspect séducteur. La société  contemporaine  s’organise  indépendamment du message que  Jésus a voulu lui donner.  Nous habitons un monde où l’Eglise se sent fatiguée d’être minoritaire, fatiguée de ne pas réussir à  se faire entendre. Les média ne répercutent plus guère sa voix.  Le Christ, une fois encore trahi semble  se résigner  à retourner  dans la tombe d’où l’avait tiré la résurrection.

C’est  pourtant dans ces conditions que nous avons encore à jouer un rôle. Nous avons à jouer le rôle   de ces pierres sur lesquelles on marche et  avec lesquelles on construit les routes  à défaut de cathédrales que l’on ne construit plus beaucoup.  En nous identifiant aux pierres nous  découvrons que nous sommes destinés à faire partie des matériaux qui servent à faciliter la progression des  hommes en marche vers leur destin sans qu’ils le sachent. Ces pierres ne crient ni leur souffrance d’être piétinées, ni leur dépit d’être ignorées mais elles sont témoins de l’amour de leur  Dieu  dont les hommes ont  tant besoin d’éprouver la réalité, faute de quoi ils sombreront dans la morosité.

Au pas lent de l’âne qui commence à fatiguer, Jésus  arrive au Temple. Il se laisse aller à la colère et bouscule les marchands qui sont là pour les besoins du culte. Peu importe la portée de son geste. Il faut réaliser que le temple, est le lieu de la  présence de Dieu, c’est la demeure du Seigneur.  En tant que tel, c’est aussi notre corps, notre personne. On  ne peut tolérer qu’il s’y passe n’importe quoi. Tout ce long cheminement de Jésus  pour atteindre le Temple n’a d’autre but que  de nous exprimer l’acharnement que met Jésus  à  prendre possession de notre propre personne. 

Il veut  nous rendre capables d’apporter louange et adoration à notre Dieu et de témoigner de sa présence au cœur de l’humanité en toutes circonstanes.  En  devenant tout à la fois l’âne sur lequel Jésus s’est assis, la foule qui acclame et les pierres qui crient, nous réalisons que Jésus  peut emprunter toutes les dimensions de notre vie spirituelle pour nous accompagner  dans notre foi et faire de nous le lieu de la présence de Dieu. Toute cette évocation  royale de Jésus n’a pas d’autre but que de s’emparer de nous-même pour faire de nous  le Temple de Dieu.  En prenant ainsi possession de nous, Jésus  nous rend conforme à notre destin premier, celui  de rendre à Dieu un culte  raisonnable.

Aucun commentaire: