mardi 22 janvier 2013

Luc 4:1-13


 Luc 4 :1-13  . La tentation au désert dimanche  17 février 2013

1Jésus, rempli d'Esprit saint, revint du Jourdain et fut conduit par l'Esprit au désert, 2 où il fut mis à l'épreuve par le diable pendant quarante jours. Il ne mangea rien durant ces jours-là et, quand ils furent achevés, il eut faim. 3 Alors le diable lui dit : Si tu es Fils de Dieu, dis à cette pierre de devenir du pain. 4 Jésus lui répondit : Il est écrit : L'être humain ne vivra pas de pain seulement.

5 Le diable le conduisit plus haut, lui montra en un instant tous les royaumes de la terre habitée 6 et lui dit : Je te donnerai toute l'autorité et la gloire de ces royaumes ; car elle m'a été livrée, et je la donne à qui je veux. 7 Si donc tu te prosternes devant moi, elle sera toute à toi. 8 Jésus lui répondit : Il est écrit : C'est devant le Seigneur, ton Dieu, que tu te prosterneras, et c'est à lui seul que tu rendras un culte.

9 Le diable le conduisit encore à Jérusalem, le plaça sur le haut du temple et lui dit : Si tu es Fils de Dieu, jette-toi d'ici en bas ; 10car il est écrit :
Il donnera à ses anges des ordres à ton sujet,
afin qu'ils te gardent ;
11 et :Ils te porteront sur leurs mains,
de peur que ton pied ne heurte une pierre.
12 Jésus lui répondit : Il est dit : Tu ne provoqueras pas le Seigneur, ton Dieu.
13 Après avoir achevé de le mettre à l'épreuve, le diable s'éloigna de lui pour un temps.


La lecture de la presse ou les informations  de la radio ou de la télévision nous plongent quotidiennement dans un monde où l’injustice règne en maître et où ceux qui en sont victimes ne reçoivent que notre compassion impuissante, tant nous nous sentons démunis face à une fatalité que nous ne maîtrisons pas. Beaucoup par fatalisme ou par indifférence ne s’en émeuvent même plus. Bien évidemment certains dont nous sommes sans doute, cherchent  à  prendre un peu de hauteur. Ils espèrent sans y croire vraiment à un sursaut de la part de ceux qui dirigent les peuples pour qu’ils orientent les affaires du monde vers un mieux-être généralisé. Ils  œuvrent quant à eux de mille façons  pour inventer des solutions et militent sans relâche dans des associations humanitaires.

Ce faisant ils ont l’impression de n’être qu’une une goutte d’eau dans un  océan de détresse. En tournant leurs regards vers Dieu, Ils ne peuvent s’empêcher de l’accuser d’être étranger à ce monde dont il s’écarte de plus en plus. Les croyants en arrivent même  à perdre la foi. Ils ont aussi l’impression que le Seigneur reste indifférent au combat qu’ils mènent pour améliorer les choses. Tout cela les rend malheureux. Ils s’accusent à leur tour de ne pas savoir faire ce qu’il faudrait faire et de ne pas agir dans la bonne direction. En même temps, ils se sentent incapables de modifier  quoi que ce soit dans  un système qui fonctionne d’une manière immuable.  Ils songent alors  qu’un changement de vie radical de leur part, faute d’agir sur le monde, leur donnerait meilleure conscience.

Certains l’ont déjà fait ! Ils se sont mis à l’écart de la société,  et ont choisi de vivre dans un univers clos, refermé sur lui-même. Ils pratiquent une piété rigoriste pour plaire à Dieu  et regardent de loin ce monde qui s’autodétruit en attendant que Dieu lui donne le coup de grâce en provoquant la fin des temps. Mais loin de fuir le monde d’autres estiment qu’ils ont à y tenir leur place.

La foi chrétienne nous a habitués à nous libérer de ces tensions et à ne plus nous culpabiliser de nos échecs. Nous espérons qu’un repentir sincère permettra  la transformation de nos individus et  ouvrira nos âmes au pardon et au salut. Mais si cette attitude nous conforte dans la foi, elle ne change  en rien le monde qui nous entoure et dont nous nous voulons solidaires. Nous sommes alors tentés, le mot est enfin prononcé, de nous demander si  nous sommes sur la bonne voie et si en croyant servir Dieu nous ne nous fourvoyons pas. Nos nous demandons même   s’il ne faut pas chercher ailleurs d’autres comportements ou d’autres explications que dans une religion qui paraît dépassée. En nous posant de telles questions, nous plongeons  au cœur de la tentation où Jésus vient nous rejoindre ce matin.

C’est lui qui vient maintenant nous rencontrer dans le désert de nos âmes. Il prend en charge tous nos questionnements. Il nous invite à le suivre sur  le chemin qui mène à Dieu et qui débouche sur une espérance pour ce monde. Mais pour y arriver il faut nous cramponner à la foi qui fut la sienne quand il était sur terre et qui doit être encore la nôtre aujourd’hui.

C’est alors qu’une première tentation nous guette déjà. C’est celle qui consiste à enfermer Jésus dans un monde qui n’est pas le nôtre. Nous sommes tentés de croire que son combat pour sauver le monde ressemblerait à un combat héroïque où il aurait affronté le diable, tel Saint Michel terrassant le démon et nous aurait  délivrés de l’emprise du mal comme par magie. Nous en arriverions ainsi à penser que Jésus nous sauverait malgré nous et  que nous serions de simples spectateurs de l’événement. C’est parce que nous savons que les choses ne sont pas exactement  ainsi, que nous sommes tentés de croire que Dieu s’est écarté le monde.

Les tentations que surmonte Jésus sont les nôtres, elles nous poussent à mettre Dieu en cause, c’est pourquoi  nous aimerions le forcer à agir pour qu’il s’affirme comme Dieu selon notre conception des choses. Nous aimerions qu’il produise du pain en abondance pour que les déshérités cessent d’avoir faim. C’est la première tentation à laquelle le diable soumet Jésus. Cette tentation est bien évidemment  la nôtre. Elle trouve même ses racines dans l’expression de notre foi. Elle se manifeste même  dans la célébration de nos cultes au moment de la prière dite prière  d’intercession.

 Nous y  faisons bien souvent  l’inventaire de tout ce qui va mal dans notre église, dans notre ville et dans le monde. Nous constatons que si Dieu  n’intervient pas dans les situations que nous lui présentons, cela relève de sa volonté. Nous  lui rappelons cependant que nous faisons tout ce qui est  en notre pouvoir pour remédier aux situations que nous lui soumettons. Nous lui disons que nous avons mis la main à la poche et à la pioche, mais nos efforts sont restés vains. Nous ne manquons pas de rappeler que les associations caritatives sont à l’œuvre et que notre église reste fidèle dans la prière. Nous estimons avoir accompli correctement ce que nous devions faire. Malgré tout, notre prière est restée terriblement accusatrice à l’égard de Dieu, car nous nous sommes comportés comme si nous le  tenions pour responsable du fait que  les situations que nous lui avons soumises n’évoluent pas. Nous l’accusons, de ne pas être le régulateur du monde comme  nous l’espérons.

N’est-ce pas là une tentation  qui nous assaille continuellement ? Elle consiste à croire que Dieu devrait efficacement réguler le monde à sa manière. Mais Dieu n’est pas le régulateur du monde, il en est le créateur. Puisqu’il  a créé libres, les  hommes qui l’habitent, c’est donc à eux de  prendre le monde en charge. Mais nous doutons qu’ils puissent le faire, nous doutons du fait  que Dieu qui a créé toute chose n’ait pas rendu les hommes  capables de  réguler le monde.  Notre tentation est de croire que le monde a besoin d’un miracle  pour se tirer d’affaire et que Dieu se refuse à le faire. Et comme ce miracle ne se produit pas, notre tentation est grande de croire que Dieu  est impuissant à aider l' humanité défaillante. Notre tentation est de croire que l’Evangile  ne peut guider les hommes  dans leur gestion des affaires du monde. Pourtant,  la seule arme dont Jésus dispose face au tentateur est d’affirmer  que la parole de Dieu est assez efficace   en elle-même pour que le monde ne se perde pas.  Il n’a rien d’autre à nous confier.

Pour nous tirer de ce mauvais pas où notre logique nous entraîne, nous persévérons dans l’idée que le monde est soumis au mal. Nous pensons même qu’il a pris le pas sur Dieu. Voilà une nouvelle tentation à laquelle nous succombons continuellement. Elle consiste à nous croire irresponsables de la tournure que prennent les choses  à cause de la fatalité du mal qui pèse sur nous. Nous sommes tentés de nous comporter comme si Jésus ne nous avait pas vraiment libérés par sa résurrection et qu’il ne nous avait pas ouvert les portes de l’avenir en nous montrant que seul l’amour pour les autres était porteur d’avenir. Nous sommes continuellement tentés de plaider notre irresponsabilité en pensant que c’est Dieu qui n’en fait pas assez.

La tentation suprême, c’est celle de ne pas nous faire confiance à nous-mêmes et de faire comme si l’action du Saint Esprit était inefficace en nous. Elle consiste à  croire que le Christ ne serait pas capable de nous aider  à triompher de la fatalité qui pèse sur nous. Encore une fois il nous renvoie à l’Ecriture pour puiser en elle l’enseignement susceptible de nous faire surmonter la tentation. Seul l’intérêt du prochain  a force de loi, et c’est lui qui doit nous aider à jouer notre rôle.

Il nous faut donc  croire que ceux qui œuvrent dans le monde ne restent pas toujours étrangers à cet enseignement. Il nous est permis d’espérer  que par leurs actions les docteurs du monde trouvent parfois  leur place dans le  camp des justes. Est-il alors impossible de penser que le cœur des hommes qui sont aux commandes sur cette planète  peut être assez malléable  pour que l’esprit de Dieu l’atteigne ?  Leur brillante intelligence est  capable de les amener à considérer que seule une attitude semblable à celle préconisée par l’Evangile est susceptible d’améliorer la situation du monde. Serait-il alors impensable que l’Esprit de Dieu puisse travailler l’intelligence de ces hommes  et de ces femmes et les amène à découvrir que l’altruisme est la seule voie porteuse d’avenir ? Ils réaliseront alors que sans le savoir ils sont parfois sur la même route que Dieu.

Nous sommes régulièrement tentés de croire que Dieu n’est pas à la hauteur de ce qu’il promet et que l’homme n’est pas capable de réaliser de telles promesses. Est-ce bien raisonnable ?

Illustrations Jérôme Brescia

Aucun commentaire: