mardi 26 janvier 2010

Maudit soit l'homme qui se confie en l'homme Jérémie 17:5-11 dimanche 14 février 2010



Jérémie 17 :5-11

5 Ainsi parle l'Éternel : Maudit soit l'homme qui se confie dans un être humain, Qui prend la chair pour son appui, Et qui écarte son cœur de l'Éternel ! 6 Il est comme un génévrier dans la steppe, Et il ne voit pas arriver le bonheur ; Il habite les lieux brûlés du désert, Une terre salée et sans habitants. 7 Béni soit l'homme qui se confie en l'Éternel, Et dont l'Éternel est l'assurance ! 8 Il est comme un arbre planté près des eaux, Et qui étend ses racines vers le courant ; Il ne voit pas venir la chaleur Et son feuillage reste verdoyant ; Dans l'année de la sécheresse, Il est sans inquiétude Et il ne cesse de porter du fruit. 9 Le cœur est tortueux par-dessus tout Et il est incurable : Qui peut le connaître ? 10 Moi, l'Éternel, j'éprouve le cœur, Je sonde les reins, Pour rendre à chacun selon ses voies, Selon le fruit de ses agissements. 11 Comme une perdrix qui couve ce qu'elle n'a pas pondu, Tel est celui qui acquiert des richesses injustement ; Au milieu de ses jours il doit les quitter, Et au moment de sa fin, il n'est qu'un insensé.

« Maudit soit l’homme qui se confie en l’homme »


Avez-vous déjà senti l’odeur épicée du genévrier dont les racines disputent aux cailloux et aux grillons les quelques restes de terre de garrigue que l’érosion n’a pas encore emportée. Quiconque s’est déjà promené sur les sentiers pierreux du midi méditerranéen a été témoin de ces combats pour la vie que mène la maigre végétation. Elle a tout à envier à ces arbres majestueux que la chance ou le hasard ont planté le long des ruisseaux qui murmurent et qui alimentent des trous de verdure salutaires au milieu des broussailles qui végètent. Tel est le spectacle quotidien que contemple Jérémie qui nous livre ses réflexions toutes embaumées des parfums de la nature qu’il découvre sous ses pas.

Dans le buisson qui se dessèche, Dieu l’invite à découvrir le sort de celui qui vit sans Dieu, et il reconnaît dans l’arbre verdoyant celui qui ouvre son cœur à la caresse de l’esprit su Seigneur. Le prophète ne peut alors s’empêcher de cogiter. Il sait qu’il y a des hommes qui traversent la vie sans se soucier de savoir s’il y a eu un avant et s’il y aura un après pour eux. Voyageurs sans bagage, ils se contentent de profiter des plaisirs du moment tout en ignorant si leur parcours a seulement un but. Ils se refusent à toute question sur le sens de ce qui les entoure. Pour ne pas se laisser envahir par des questions dont ils redoutent les réponses, ils tentent de goûter à tous les plaisirs éphémères d’une vie qui se terminera pour eux dans le néant.

Jérémie qui les voit ainsi s’agiter frémit de pitié et laisse aller sa colère. S’il ne semble avoir que du mépris pour ces gens là, c’est que le temps presse car il a l’intuition que leur aveuglement précipite l’histoire vers un destin qui n’est guère enviable. Pour lui, il est insensé de ne pas chercher à savoir quel est le sens de sa vie car le monde où nous sommes n’a de sens que pour celui qui sait mettre toute sa confiance en Dieu. Dieu vient au devant de chaque individu dans ce monde pour lui révéler qu’il y a un rôle à jouer. Quand ce rôle est bien rempli, c’est alors que la gloire de Dieu se manifeste, et si la gloire de Dieu n’est pas manifestée, le monde perd son sens et se condamne lui-même à disparaître.

Telle est la leçon que nous retirons de l’aventure de Jérémie qui voit dans l’anéantissement prochain du peuple d’Israël condamné à l’exil, une perte de sens fatale pour l’humanité. Mais Dieu ne se résigne jamais à l’échec des hommes. Il se servira de la catastrophe pour donner à nouveau du sens à ce qui n’en avait plus. C’est au contact de la nature et des choses simples qui l’entourent que Jérémie puise son inspiration. Il est accessible à la beauté des choses et des hommes. Il sait voir les gestes de Dieu quand il regarde le potier exercer son art et il se réjouit de son savoir-faire. Il sourit si d’aventure il rate son pot et il en tire leçon de la part de Dieu. Tout ce qui vit dans son entourage, lui révèle la présence de Dieu. Même la perdrix qui s’empare des œufs de sa voisine pour les intégrer à sa propre couvée est porteuse d’un enseignement.

Il n’est donc pas surprenant si, en ouvrant le Livre de Jérémie, on découvre que c’est une branche d’amandier en fleurs qui lui révèle sa propre mission. C’est en regardant bouillir le chaudron qui sert à faire cuir le potage que la vapeur qui s’en échappe lui révèle l’imminence du danger qui vient du Nord. Dieu est tellement présent dans son environnement qu’il a du mal à comprendre que des hommes restent indifférents à la présence de Dieu puisque sa gloire éclate de partout. Cette incompréhension de la part de ces semblables et si forte qu’il en arrive à douter de sa propre vocation. La gloire de Dieu consiste en ce que les hommes découvrent que Dieu intervient dans le monde pour que ce vaste ensemble évolue harmonieusement.

Il se sert de l’histoire d’Israël pour servir d’exemple au monde. Si l’histoire de ce peuple a du sens dans le concert des nations, c’est que Dieu lui a donné pour destin d’être témoin de cette harmonie dont nous parlons. Malgré les injonctions de Jérémie, Israël dérape, comme le pot raté du potier. Israël préfère se confier en la sagesse des hommes plutôt que de se laisser guider par les intuitions que Dieu lui donne. Si la collectivité d’Israël est insensée, si elle ne comprend pas quel rôle elle joue dans l’histoire, c’est que ses habitants sont insensés eux-aussi et en particulier les puissants qui le gouvernent, car ils persistent à ignorer ce que Dieu veut leur faire comprendre.

En effet, l’homme qui reste loin de Dieu croit que le seul intérêt de l’existence est de s’accomplir individuellement au détriment des autres. A l’opposé, par la voix des prophètes Dieu révèle que le sens de la vie de chacun consiste à entrer dans l’harmonie générale qui devrait présider à l’évolution de la société. Personne ne devrait prendre le pas sur l’autre, car personne n’est né pour dominer ses semblables. Le seul qui soit apte à le faire, c’est Dieu, et il a choisi justement de ne pas le faire. Jésus lui-même mettra cette notion d’harmonie générale au centre de son enseignement et cela lui coûtera la vie. Il devra affronter les hommes qui considèrent eux, que l’évolution normale de l’humanité réside dans la loi du plus fort, selon laquelle il appartient aux hommes qui sont au pouvoir de régler le destin de l’humanité. Même si parfois, ils font semblant d’associer Dieu à leur gestion, ils concèdent seulement à la sagesse divine le soin de gérer l’au-delà, de sauver l’âme des hommes pécheurs et d’administrer l’éternité, mais ils ne lui reconnaissent aucun droits sur l’évolution du monde. En fait, dans notre société, on ne reconnaît aucun rôle à Dieu si non celui d’être le destinataire de toutes les questions auxquelles la science ne sait pas encore répondre.

Pourtant une question cependant se pose : Comment les hommes savent-ils qu’ils doivent mettre en œuvre les notions de justice, d’égalité de partage et d’amour pour que se réalisent la seule évolution possible du monde ? Et comment se fait-il qu’ils n’y arrivent pas ?

Ils n’y arrivent pas parce qu’ils n’ont pas encore compris qu’ils doivent passer par une transformation radicale de leur conscience intérieure ? Et seul le Dieu qui semble ne plus compter pour eux peut la provoquer en eux. Insensés dirait Jérémie, vous cherchez à résoudre les problèmes de votre temps en faisant confiance au génie des hommes. Vous croyez que seule votre intelligence est capable de résoudre les crises de la planète, alors que la planète entière est malade de la manière dont vous la gérez en dépit de la sagesse du cœur que Dieu a mis en vous.

Sans doute certains diront-ils que c’est ici un raisonnement simpliste. D’autres diront que c’est réduire la capacité créatrice de Dieu à très peu de chose puisqu’ il suffirait que les humains prennent au sérieux leur capacité de s’aimer mutuellement pour que l’avenir du monde soit changé ! Sans doute, ceux qui disent cela auront-ils raison. Mais force nous est donnée de constater que les hommes n’arrivent pas par eux-mêmes à laisser cette capacité de générosité qui est en eux se développer pour que l’espérance d’une humanité plus heureuse voie le jour. Nous constatons aussi qu’ils refusent de laisser Dieu les transformer de l’intérieur, sans quoi, ça se verrait !

Nous entendons alors, Jérémie s’insurger contre l’entêtement des humains qui s’acharnent à faire ce qu’il ne faut pas faire. Il crie donc à leurs oreilles : « maudit soit l’homme qui se confie en l’homme… ». Mais le pessimisme ne prend pas le dessus. A peine a-t-il mis les hommes en garde qu’il leur suggère un moyen de s’en sortir : « béni soit l’homme » qui est comme l’arbre qui puise sa nourriture dans le sol grâce au réseau invisible de ses racines et de ses radicelles. Il laisse Dieu inspirer ses actes par tous les canaux invisibles qu’emprunte son esprit. Il laisse sa vie intérieure s’alimenter de sa grâce. Il devient alors capable de saisir le souffle de Dieu qui le remplit de sa sagesse.



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