jeudi 21 mai 2009

Et si le paradis était pour demain? Romains 8/11-17 dimanche 7 juin 2009








Romains 8/11-17




11Et si l'Esprit de celui qui a réveillé Jésus d'entre les morts habite en vous, celui qui a réveillé le Christ d'entre les morts fera aussi vivre vos corps mortels par son Esprit qui habite en vous.
12Ainsi donc, mes frères, nous sommes bien débiteurs, mais non pas envers la chair — pas pour vivre selon la chair. 13En effet, si vous vivez selon la chair, vous allez mourir ; mais si par l'Esprit vous faites mourir les agissements du corps, vous vivrez. 14Car tous ceux qui sont conduits par l'Esprit de Dieu sont fils de Dieu. 15En effet, vous n'avez pas reçu un esprit d'esclavage, qui ramène à la crainte, mais vous avez reçu un Esprit d'adoption filiale, par lequel nous crions : Abba ! — Père ! 16L'Esprit lui-même rend témoignage à notre esprit que nous sommes enfants de Dieu. 17Or si nous sommes enfants, nous sommes aussi héritiers : héritiers de Dieu, et cohéritiers du Christ, s'il est vrai que nous souffrons avec lui pour être aussi glorifiés avec lui
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C'est le printemps et le moment des piques niques champêtres. Ce sermon est proposé pour une journée paroissiale à la campagne.








Qui ne s’est pas pris à rêver d’un monde où tout irait selon son goût ? L’idée que la vie pourrait être un long fleuve tranquille en dépit de ce qu’en a dit le cinéma ne nous a-t-elle jamais effleurés, ne serait-ce qu’un instant ? Mais bien vite l’idée plus réaliste selon laquelle la vie ressemblerait à une tartine d’épreuves dont il faudrait manger, une bouchée chaque jour s’impose à notre raison.

Pourtant l’image d’une société idéale évoluant dans une oasis de délice d’où serait bannie toute idée de rivalité et de violence reste en arrière plan des textes bibliques et laisse subsister en nous l’idée d’un paradis perdu dont on pourrait encore retrouver le chemin, mais par quel moyen ?

Jésus lui-même n’a-t-il pas saupoudré son Evangile d’images bucoliques à souhait, propres à nous faire rêver d’un monde nouveau qui ressemblerait à des vacances sans fin dans une palmeraie idyllique parfaitement sécurisée à l’image des villages de vacances du Club-Med, le prix en moins. Parlant des Ecritures nous nous prenons à évoquer la parabole du bon berger qui nous entraîne vers des pâturages d’herbe grasse où folâtrent des brebis qui ne seront ni mangées par les loups, ni mangées par les mauvais bergers ni égorgées par quelques bouchers faisant leur office de sacrificateurs sur l’autel du Temple. C’est aussi la réminiscence des psaumes qui nous visitent et nous nous plaisons à réciter leurs prières avec dévotion : « L’Eternel est mon berger, je ne manquerai de rien, il me fait reposer dans de verts pâturages… »


Mais ce n’est pas tout, les livres des prophètes nous apportent leur lot de sérénité et nous disent que ces rêveries sont conformes au message des Ecritures. C’est alors l’image de l’ours qui mange de la paille en compagnie du bœuf qui vient à notre esprit, et c’est aussi l’image du petit garçon qui met ses doigts là où il ne faut pas sans que le serpent ne le morde qui nous attendit.

La Bible nous réserve donc ces images fortes pour nous inviter à rêver quand par un beau jour de printemps, il a été prévu de consacrer la journée à un pique nique paroissial où chacun aura à cœur de partager ses provisions avec les autres. Nous comprenons alors que sans qu’ils le sachent eux-mêmes, cette journée a été prévue par ses organisateurs, comme le sont souvent nos sorties paroissiales au mois de juin, comme une anticipation de ce paradis que l’on aimerait retrouver pour jouer à cache-cache avec Eve et Adam et refaire le monde à l’image de toutes nos illusions.

On se croit en droit de cultiver ce mythe et d’inviter nos amis à le faire avec nous car même les philosophes, à l’image de Rousseau l’ont également fait. On s’y adonne d’autant plus volontiers que d’autres cultures que la nôtre cultivent ce même désir de retrouver un monde oublié que l’on croyait à jamais perdu. Les Inuits en voyant fondre les glaces, ne rêvent-ils pas de chasses éternelles où les phoques abonderaient sur une banquise toujours solide. L
e Coran lui-même ne promet-il pas aux héros de la foi, un paradis qui prend l’aspect d’ un harem plein de jeunes vierges prêtes à se donner pour être consommées ( Sourates 3,15 et 52/24). Toutes ces cultures, celle de la bible comprise laisse entendre que ces délices aujourd’hui confisqués relèveront de l’ordre du possible demain, s’il plait à Dieu, si bien que, dans l’inconscient collectif, ce monde n’est pas voué au malheur, mais qu’il peut y avoir au bout du chemin une réalité voulue par Dieu et destinée à nous combler.

Mais ce chemin n’est pas sans embûches, il y a des pierres sous les pas de ceux qui le suivent ! C’était prévisible, et vous saviez bien qu’à un moment quelconque j’allais interrompre ces rêveries qui n’avaient que trop duré, pour vous faire replonger dans la réalité de ce monde qui ne nous invite pas à avancer sur des routes bien asphaltées. Il était facile à deviner que j’allais faire ressortir les pierres du chemin. Ce sont les propos de Paul que nous avons lus en commençant qui m’invitent à porter un autre regard sur les chemins de l’espérance.

Pourtant il entre bien dans cette même vision des choses que nous avons évoquée. Il nous invite à nous laisser saisir par l’esprit de Dieu, à devenir ses enfants et à le rejoindre dans un autre monde. Mais sans qu’on s’y attende, en tout cas pour ceux qui n’ont pas lu le début du passage, nous découvrons que Paul a introduit le mot de « souffrance » dans son propos, ce qui semble tout remettre en cause et notre belle utopie s’effondre devant la fatalité du mal.

Mais cette évocation de la souffrance va avoir pour effet de nous faire rebondir, car elle aura le mérite de placer notre relation à Dieu au sein de la réalité que nous vivons chaque jour. Nous sommes alors amenés à considérer que si Dieu est présent avec nous dans ce monde, il nous donne la possibilité de dépasser tout ce qui nous éprouve si bien qu’il nous propose quand même, d’inscrire l’espérance dans nos projets de vie.

Avant de parler de souffrance au sujet de laquelle il va bien falloir que nous nous arrêtions, Paul nous laisse entendre qu’il y a en nous des possibilités de dépassement qui nous permettrons de surmonter tous les obstacles qui nous font souffrir, même les plus féroces, si nous acceptons de faire l’effort de devenir les intimes de Dieu. Le premier signe de cette intimité avec lui, consiste à ne plus l’appeler par son nom de Dieu mais à se référer à lui comme à un père qui dépose en nous toute sa tendresse au point que le regard que nous portons sur notre vie en est transformé.

Il ne s’agit pas de notre vie future imaginée par nos désirs en quête d’évasion. Il s’agit de la vie bien réelle du quotidien de notre existence. Il ne s’agit plus de rêveries champêtres que l’on pourrait faire un jour de sortie paroissiale. Il s’agit de notre existence que nous devons assumer avec son lot de souffrances, de provocations, d’incertitudes. La réalité que nous propose Paul serait de pratiquer l’art de ne pas s’évader dans le rêve, mais de prendre en compte la réalité quotidienne. La présence de Dieu dans l’intimité de notre vie nous rend capables de maîtriser les obstacles en les surmontant. Nous devons faire confiance à celui qui se tient si près de nous et qui nous invite à le tutoyer en l’appelant papa. Abba

Tout cela est bien séduisant, mais pour y parvenir, il faudrait comprendre comment ça marche ! C’est pourtant simple. A la suite de Jésus, Paul nous demande de changer notre regard sur Dieu. Avant d’être Dieu, il est d’abord Père, et comme tous les Pères aimants, il ne tient aucun compte de nos fautes ou de nos erreurs, ou plus exactement il ne les utilise pas pour exercer sur nous une forme de pression quelconque. Sa main ne s’appesantit jamais sur nous, c’est pourquoi nous ne pouvons jamais cesser de l’aimer.

Il vient habiter dans nos vies au point d’assumer toutes nos morts et de permettre que toutes nos souffrances, même les plus terribles ne nous anéantissent pas mais s’ouvrent toujours sur l’espérance.


Cette nouvelle vision de Dieu implique de notre part une nouvelle relation avec lui. Nous devons assumer notre situation d’enfants bien aimés en comprenant qu’il n’est jamais l’auteur de nos malheurs et qu’il ne nous accorde pas ses faveurs en fonction des séductions que nous pourrions exercer sur lui.

En entrant ainsi dans l’intimité de Dieu, nous devenons selon sa volonté les héritiers de toutes ses grandes ambitions qu’il formule pour l’humanité en matière de justice, égalité, bonheur. Il fait de nous les acteurs de toutes les actions qu’il faut entreprendre contre la souffrance, et détruire tous les visages que prend le mal quand il s’en prend à l’intégrité de nos personnes par les injustices de toute sorte, la méchanceté sous toutes ses formes, les maladies, même les plus sournoises. Dans tous ces domaines. Dieu a besoin de nous pour rendre le monde de plus en plus viable jusqu’à le rendre parfait.

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