samedi 7 mars 2009

Appel à collaboration pour actes 27

Ce texte présente une difficulté d'interprétation pour laquelle j'aimerais l'avis des lecteurs. Merci d'intervenir.

Chapitre 27 T.O.B.

1Quand notre embarquement pour l'Italie a été décidé, on a remis Paul et d'autres prisonniers à un centurion nommé Julius, de la Cohorte Augusta. 2Nous sommes alors montés à bord d'un bateau d'Adramyttium en partance pour les côtes d'Asie et nous avons pris la mer. Il y avait avec nous Aristarque, un Macédonien de Thessalonique. 3Le lendemain, à l'occasion d'une escale à Sidon, Julius, qui traitait Paul avec humanité, lui a permis d'aller trouver ses amis et de profiter de leur accueil. 4De là, reprenant la mer, nous avons fait route sous Chypre, car les vents nous étaient contraires. 5Ce fut alors la traversée de la mer qui borde la Cilicie et la Pamphylie, et nous avons débarqué à Myre, en Lycie. 6Le centurion, trouvant là un bateau d'Alexandrie en route vers l'Italie, nous y a fait embarquer. 7Durant quelques jours notre navigation a été ralentie et c'est à grand-peine que nous sommes arrivés à la hauteur de Cnide. Comme le vent nous contrariait, nous sommes passés sous la Crète, vers le cap Salmonè 8et, après l'avoir doublé de justesse, nous sommes arrivés à un endroit appelé Beaux Ports, près de la ville de Lasaïa.
9Mais un certain temps s'était écoulé, et il devenait désormais dangereux de naviguer, puisque le Jeûne était déjà passé. Paul a voulu donner son avis : 10« Mes amis, leur a-t-il dit, j'estime que la navigation va entraîner des dommages et des pertes notables non seulement pour la cargaison et le bateau, mais aussi pour nos personnes. » 11Le centurion néanmoins se fiait davantage au capitaine et au subrécargue qu'aux avertissements de Paul. 12Comme le port, en outre, se prêtait mal à l'hivernage, la majorité a été d'avis de reprendre la mer ; on verrait bien si l'on pouvait atteindre Phénix, un port de Crète, ouvert au sud-ouest et au nord-ouest et y passer l'hiver.
La tempête
13Une petite brise du sud s'était levée, et ils se sont imaginé que ce projet était réalisable ; ayant donc levé l'ancre, ils ont tenté de border la côte de Crète. 14Mais presque aussitôt, venant de l'île, un vent d'ouragan, qu'on appelle euraquilon, s'est abattu sur eux ; 15le bateau fut emporté, incapable de remonter au vent, et, laissant porter, nous allions à la dérive. 16Filant sous le couvert d'une petite île appelée Cauda, nous avons pourtant réussi, de justesse, à maîtriser le canot. 17Après l'avoir hissé à bord, on a eu recours aux moyens de fortune : ceinturer le bateau de cordages et, par crainte d'aller échouer sur la Syrte, filer l'ancre flottante ; et l'on a continué ainsi de dériver. 18Le lendemain, comme nous étions toujours violemment secoués par la tempête, on jetait du fret 19et, le troisième jour, de leurs propres mains les matelots ont affalé le gréement. 20Ni le soleil ni les étoiles ne se montraient depuis plusieurs jours ; la tempête, d'une violence peu commune, demeurait dangereuse : tout espoir d'être sauvés nous échappait désormais.
21On n'avait plus rien mangé depuis longtemps quand Paul, debout au milieu d'eux, leur a dit : « Vous voyez, mes amis, il aurait fallu suivre mon conseil, ne pas quitter la Crète et faire ainsi l'économie de ces dommages et de ces pertes. 22Mais, à présent, je vous invite à garder courage : car aucun d'entre vous n'y laissera la vie ; seul le bateau sera perdu. 23Cette nuit même, en effet, un ange du Dieu auquel j'appartiens et que je sers s'est présenté à moi 24et m'a dit : “Sois sans crainte, Paul ; il faut que tu comparaisses devant l'empereur et Dieu t'accorde aussi la vie de tous tes compagnons de traversée ! ” 25Courage donc, mes amis ! Je fais confiance à Dieu : il en sera comme il m'a dit. 26Nous devons échouer sur une île. »
Sauvés du naufrage
27C'était la quatorzième nuit que nous dérivions sur l'Adriatique ; vers minuit, les marins ont pressenti l'approche d'une terre. 28Jetant alors la sonde, ils ont trouvé vingt brasses ; à quelque distance, ils l'ont jetée encore une fois et en ont trouvé quinze. 29Dans la crainte que nous ne soyons peut-être drossés sur des récifs, ils ont alors mouillé quatre ancres à l'arrière et souhaité vivement l'arrivée du jour. 30Mais, comme les marins, sous prétexte de s'embosser sur les ancres de l'avant, cherchaient à s'enfuir du bateau et mettaient le canot à la mer, 31Paul a dit au centurion et aux soldats : « Si ces hommes ne restent pas à bord, vous, vous ne pourrez pas être sauvés. » 32Les soldats ont alors coupé les filins du canot et l'ont laissé partir.
33En attendant le jour, Paul a engagé tout le monde à prendre de la nourriture : « C'est aujourd'hui le quatorzième jour que vous passez dans l'expectative sans manger, et vous ne prenez toujours rien. 34Je vous engage donc à reprendre de la nourriture, car il y va de votre salut. Encore une fois, aucun d'entre vous ne perdra un cheveu de sa tête. » 35Sur ces mots, il a pris du pain, a rendu grâce à Dieu en présence de tous, l'a rompu et s'est mis à manger. 36Tous alors, reprenant courage, se sont alimentés à leur tour. 37Au total, n
ous étions deux cent soixante-seize personnes à bord. 38Une fois rassasiés, on a allégé le bateau en jetant le blé à la mer.
39Une fois le jour venu, les marins ne reconnaissaient pas la terre, mais ils distinguaient une baie avec une plage et ils avaient l'intention, si c'était possible, d'y échouer le bateau. 40Ils ont alors filé les ancres par le bout, les abandonnant à la mer, tandis qu'ils larguaient les avirons de queue ; puis, hissant au vent la civadière, ils ont mis le cap sur la plage. 41Mais ils ont touché un banc de sable et y ont échoué le vaisseau ; la proue, enfoncée, est restée prise, tandis que la poupe se disloquait sous les coups de mer. 42Les soldats ont eu alors l'idée de tuer les prisonniers, de peur qu'il ne s'en échappe à la nage. 43Mais le centurion, décidé à sauver Paul, les a empêchés d'exécuter leur projet ; il a ordonné à ceux qui savaient nager de sauter à l'eau les premiers et de gagner la terre. 44Les autres le feraient soit sur des planches soit sur des épaves du bateau. Et c'est ainsi que tous se sont retrouvés à terre, sains et saufs.






Actes 27 nous relate un des naufrages célèbres de Paul. Selon 2 Corinthiens 11/25 il en aurait fait trois autres, ce qui lui donne une certaine compétence sur laquelle s’appuie l’auteur de ce chapitre.

La plupart des exégètes autorisés font confiance à ce texte et ne mettent pas en doute le bien fondé de l’attitude de Paul. On peut cependant se poser la question pour savoir si la vérité n’est pas différente. Dans ces quelques lignes nous allons tenter de faire une autre approche, mais nous allons avoir besoin de vous pour vérifier nos thèses.

Paul a-t-il sauvé les passagers du bateau ainsi que l’équipage par sa clairvoyance, comme le dit le Livre des Actes au chapitre 27 ou au contraire précipite-t-il la perte du navire par son interventionnisme inopportun en poussant les soldats à couper les cordes qui retiennent la chaloupe à bord du navire? La réponse que nous apporterons à cette à cette question aura des conséquences importantes sur la nature de ce texte.

Pour trancher entre ces deux thèses il faudra vérifier, entre autres, si au verset 32 et 33 la perception de Paul est la bonne. Il faudra savoir si les marins sont en train de s’échapper du bateau avec la chaloupe ou s’ils se préparent à opérer une manœuvre particulière pour déplacer les ancres et permettre au bateau d’être en situation favorable pour accoster.

Pour en savoir plus, nous aurons besoin des compétences des lecteurs qui sont avertis sur les conditions de la navigation antique et qui savent comment on manœuvrait les bateaux à cette époque et peut être, encore à notre époque en Méditerranée. Donc n’hésitez pas à nous faire part de vos connaissances.

Il est clair que depuis le départ de Myra en Lycie les marins faisaient preuve de compétence. Les spécialistes l’attestent (1). La prudence des marins imposait au navire d’avancer lentement étant donné que la saison était avancée. Le jeûne était dépassé ( il s’agissait du Kippur) et la tradition maritime voulait que l’on arrête de naviguer quelques jours après, à la fête des Tentes. Le pilote maintenait son navire loin des côtes pour que l’embarcation ne soit pas poussée vers les rochers par gros temps. Le centurion, responsable des prisonniers manifesta sa confiance au pilote et au capitaine, plutôt qu’à Paul (v.11).Ce qui est un élément en faveur de l’équipage. En fait le centurion était seulement responsable des prisonniers et n’avait pas à intervenir sur la marche du bateau. Au moment où les circonstances l’exigèrent les marins hissèrent la chaloupe à bord et ceinturèrent le navire avec des cordages comme il est logique de le faire en pareilles circonstances (v. 17). La chaloupe était précieuse car c’est elle qui permettait de manœuvrer les ancres pour accoster. Les témoins de l’antiquité racontent aussi qu’il était normal, en cas de gros temps de jeter à la mer tous les objets qui étaient sur le pont et qui auraient pu nuire, par leur déplacement à l’équilibre du bateau et à la sécurité des passagers qui étaient au nombre de 276. (v.19) Là aussi l’équipage fit ce qu’il était normal de faire. Les marins, qui ont l’habitude de la mer, perçurent en pleine nuit la proximité d’une terre (v.27), c’est dire qu’ils étaient aguerris aux techniques de la navigation et qu’ils savaient percevoir à l’odeur ou au sens de la houle que la terre était proche.

Pourquoi, alors que l’équipage, le pilote et le capitaine sont perçus comme des gens compétents se produisit-il un retournement de situation sous l’impulsion de Paul qui prit autorité sur le centurions qui poussa ses soldats à couper les cordes de la chaloupe sans prendre l’avis de personne ? Comment, cet équipage apparemment bien commandé n’était-il pas capable de voir que quelques individus étaient en train de s’emparer de la chaloupe, qui est habituellement bien gardée, pour abandonner le navire ? Si c’était le cas, le capitaine n’était-il pas capable de percevoir plus vite que Paul, qui n’est pas marin, une situation qui échappait à tout le monde.

En fait, depuis le début de la nuit, la situation avait changé. Pour que l’on pressente en pleine nuit la présence d’une terre il fallait que la tempête se soit calmée et que le ciel laisse apparaître quelques étoiles pour que l’on puisse mettre la chaloupe à la mer et jeter la sonde. La situation était à l’optimisme et l’espoir renaissait.

Le jour n’allait pas tarder à poindre et il est logique de penser qu’on pouvait commencer à préparer la manœuvre qui consistait à déplacer les ancres à l’aide de la chaloupe pour orienter le navire afin qu’il soit dans la bonne position pour aborder. Une telle manœuvre délicate prend du temps, car les ancres sont lourdes, elles peuvent en effet peser une tonne, voire plus. Il était normal que l’on commence la manœuvre dès que possible en metant la chaloupe à la mer. En se privant de la chaloupe, le naufrage était assuré.

Se pose alors la question de savoir qui est le personnage qui raconte. et qui donne à paul le rôle du sauveur, alors qu'il serait par son intervention la cause du malheur. Ce personnage n’est jamais mentionné, pourtant ses connaissances en matière de navigation sont certaines. Ce texte fourmille de détails techniques pertinents et de termes propres à la navigation inconnus à la littérature du Nouveau Testament. Mais raconte-t-il la scène parce qu’il était présent sur le bateau ou la reconstitue-t-il sans l’avoir vécue ?

Tout plaide en faveur de la deuxième thèse car il semble que le texte soit raconté pour valoriser le personnage de Paul et lui donner raison contre tout le monde. Tout cela lui confère une haute stature qui aurait recueilli l’approbation de Dieu. Mais que penser alors du fait que Paul appuie ses dires sur une vision de Dieu qui lui fait prophétiser le drame, alors que le drame aurait été peut être pu être évité si on ne l’avait pas écouté ? Quelle peut bien être dans ces conditions l’autorité de la parole de Dieu, si elle est inventée pour justifier une situation ? Il ne m’appartient pas de répondre, mais de laisser au lecteur le soin de se faire une opinion personnelle.

Pour ma part, j’attends vos commentaires et vos interventions.


(1) Chantal Reynier : Paul de Tarse en Méditerranée, recherche autour de la navigation dans l’antiquité Actes 27 – 28, 16 Lectio Divina ed Cerf 2006.

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ACG 22 mars

ACG

Ac27,27-32 par ACG
- À nombre de questions simultanées élevé, réponse partielle.
Une description surprenante pour des marins :
a) manoeuvre risquée :
-tempête plus obscurité égale danger de mort
-élonger une ancre en pleine tempête est suicidaire
b) manoeuvre malvenue :
-ces marins seront irremplaçables une fois partis ou perdus
-ils sont probablement trop épuisés pour agir en sécurité
c) manoeuvre douteuse :
-peu à y gagner sauf mauvaises positions des ancres
-les ancres peuvent déraper d’elles-mêmes
d) à bord d’un navire le salut est rarement dans la fuite :
-une panique est imaginable mais il y a 276 âmes à bord !
-les gens de mer ne se laissent pas faire sans réagir !

Je ne crois pas à l’accusation de lâcheté;
éventuelle superstition des marins ou méprise des terriens;
le verset 30 souffrirait-t-il d’un mot mal choisi ?
Noter qu’un glissement par faute d’orthographe est plausible.
Les mots pour dire fuite et précaution étant très proches.
Hypothèse qu’il faudrait confier à un véritable spécialiste…

Je crois plus à l’attitude militaire : «_Tous ensemble et en-avant !_»;
celle qui sous-tend le conseil donné par Paul au verset 31,
et qui est confirmée par l’action décidée du verset 32.
Ajoutons-y le : «_Prenons des forces maintenant !_» du verset 33.

N’était-ce pas plus sensé et plus courageux ?
Cela va faire grimper Paul dans l’estime du centurion;
ce qui se vérifiera au verset 43.

Souvenons-nous aussi du verset 21 où avec sang-froid et détermination,
Paul est le seul debout dans la tempête, témoignant confiance en Dieu.

Mon analyse est naïve, mais j’ai frappé pour vous à la porte du texte…
Vous a-t-il répondu ?

PS
(v27 : «_…_», traduction à affiner, ne signifie pas accalmie, sauf omission répréhensible… )
( v37 : «_Nous étions…_», donc dit par un témoin physiquement présent sur les lieux… )

Bien à vous.
ACG 20100321

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